22.09.2010

Un drôle de père - Yumi Unita

Drole de pere tome 1.jpgDaïkicih, 30 ans, célibataire n'est pas précisement un bourreau des coeurs. Ce qui ne l'empêche pas d'être un coeur d'artichaut et de sombrer devant les beaux yeux de Rin, 6 ans, la fille illégitime de son grand-père. Rin dont personne ne veux s'occuper et qu'il va prendre en charge à sa propre surprise. C'est le début d'une drôle de famille.

Et un coup de coeur! Un drôle de père est un petit bijou de manga, plein de finesse, d'humour et qui aborde pourtant bien des thèmes graves et prend un angle pour le moins original pour parler famille monoparentale. Pas de mère célibataire ou divorcée, ici, mais un célibataire assez peu porté sur les choses familiales, certainement pas prêt à assumer une relation de couple qui se retrouve avec une enfant de 6 ans à charge et pas le plus petit début d'une idée de ce qu'il convient de faire. On le suit dans sa découverte du monde merveilleux et sans pitié des crèches et autres écoles, dans l'univers impitoyable des rayons enfants des grands magasins d'habillement, dans sa découverte estomaquée de la vie épuisante d'un papa. C'est drôle, vraiment très drôle et en même temps débordant de tendresse. Pour Daïkichi, l'impulsion d'un moment prend les couleurs d'un amour fou et de l'apprentissage d'une paternité pas comme les autres. Pour Rin, c'est après une enfance étrange et l'absence de sa mère qu'elle ne connaît pas une nouvelle vie. On la voit s'éveiller, prendre confiance en elle et apprendre à avoir confiance dans les adultes qui l'entourent.

On a une vision assez étonnante de l'éducation et du quotidien avec un enfant, de la place du père et surtout de la femme dans la société japonaise, de la famille et de ce qu'elle représente à la fois culturellement et universellement. Le tout décrit avec finesse et humour, sans oublier les problèmes quotidiens. On s'attache aux personnages, on prend plaisir à les voir évoluer, se découvrir, s'apprivoiser et s'aimer.

Je n'ai pas encore lu les deux derniers tomes, ceux dans lesquels Rin est devenue une fort jolie adolescente, mais je ne vais pas tarder à sauter dessus avec enthousiasme!

Bref, une jolie histoire à découvrir, et à savourer sans modération!

Unita, Yumi, Un drôle de père, Delcourt, Akata, série en cours, 7 tomes disponibles.

19.07.2010

Jin - Motoka Murakami

jin_01.jpgÀ 34 ans, Jin Minakata est le responsable de la section neurochirurgie du CHU de Tôto. Alors qu'il opère un patient, il fait une découverte hors du commun: l'homme a un foetus humain à l'intérieur du crane. Après qu'il l'ait extrait, des phénomènes étranges se produisent autour de lui. Jusqu'à ce qu'une chute dans les escaliers le propulse dans le Japon du 19e siècle, au coeur des combats de la fin de l'ère Keio.

Poussée par la curiosité et une boulimie de bulles, j'ai fini par ouvrir le premier tome de cette série qui a priori, ne me tentait guère. Depuis Urgence (ils ont tué Mark Greeeeeennnnnn!... Hem), plus de séries médicales pour moi, sur petit écran ou papier. Même l'argument du voyage dans le temps n'était pas parvenu jusqu'alors à me faire changer d'avis. J'avais tort. Ben oui. Jin est une excellente série, inventive et intéressante qui permet de découvrir d'une manière inhabituelle cette période historique fascinante qu'est la fin de Keio et l'avénement de Meiji.

Jin Minakata découvre la réalité d'une époque qu'il connait sans la connaître et ouvre de grands yeux étonnés et naïfs sur un monde à la fois raffiné, barbare et proche du sien dans lequel il va petit à petit s'intégrer. De tomes en tomes, on le suit à la découverte d'Edo et de Kyoto, des familles de samouraïs aux quartiers de plaisir, des prisons de l'Empereur aux ruelles des bas quartiers, des complots politiques aux combats sans merci. Jin va croiser ainsi nombre de personnages importants qui vont lui venir en aide ou tenter de le détruire. Car coincé dans une époque qui n'est pas la sienne, Jin fait le choix de pratiquer sa médecine ce qui provoque jalousie et rancoeur ou fascination (et amour parce que quand mêm il faut bien une belle histoire d'amour dans tout ça, et pas qu'une, mais ceci est une autre question).

Et c'est là que le manga devient vraiment intéressant: il va devoir confronter ses connaissances et ses habitudes à des conditions d'exercice de la médecine qui n'ont rien à voir avec ce qu'il connaît et faire face à des affections éradiquées en son temps comme la rougeole et le choléra. Le travail de fond du mangaka est impressionnant. Chaque histoire développée, chaque technique médicale utilisée et présentée a été cautionnée par un médecin. Certaines cases ne sont pas sans rappeler des planches d'anatomie par leur précision. On découvre donc bien des choses à commencer par les moyens de fabriquer de la pénicilline artisanalement. On oublie presque qu'il s'agit d'une histoire de voyage dans le temps tant la médecine est au centre.

Seul regret, on se cantonne généralement aux différences entre médecine traditionnelle et médecine contemporaine, aux moyens que trouve Jin pour compenser les différences de matériel et de pharmacopée sans réellement parler des pratiques médicales du 19e siècle et de la confrontation entre médecine traditionnelle orientale et médecine occidentale, laquelle est tout juste abordée comme un arrière-fond qui va avec celui des bouleversements politiques de ce temps.

Heureusement il n'y a pas que ça! Au fil des volumes, les personnages secondaires s'étoffent, deviennent attachants, les complots et les drames se nouent, faisant naître une tension qui pousse à ouvrir le tome suivant et à découvrir ce qu'il advient du héros et de ses partisans. Et cela même si le grand coeur de Jin le rend parfois un brin agaçant et s'il faut un peu de temps pour que le scénario ne se contente pas d'aligner les histoires médicales mais entre dans le vif du sujet: la confrontation de deux médecines.

Bref, une belle découverte et une jolie série qui mérite le détour!

Murakami, Motoka, Jin, 18 vol., 11 traduits, série en cours. 9 volumes lus, ed. Tonkam

12.12.2009

Sky Hawk - Jiro Taniguchi

Hikosaburô et Manzô vivent sur le territoire Crow. Exilés aux États-Unis depuis les conflits qui ont marqué la naissance de l'ère Meiji, les deux samouraïs ne se doutent pas qu'ils vont bientôt repartir en guerre. En sauvant Runnong Deer, une indienne, des griffes du marchant qui l'avait acheté, ils s'embarquent dans une aventure qui va les mener à rejoindre le clan de Crazy Horse et à se joindre à la guerre sans espoir menée contre les hommes blancs.

Pour moi, la sortie d'un nouveau Taniguchi est toujours synonyme de bonheur. J'étais donc toute sautillante de joie à l'idée de tourner les pages de son nouvel opus. Las, la magie n'a pas été, cette fois-ci, au rendez-vous. Pourtant, Sky Hawk fourmille de bonnes idées. La première est d'utiliser un fait très peu connue: l'émigration vers les États-Unis d'un petit nombre de samouraïs à la fin du 19e siècle. Dès lors qu'on le sait, la présence des deux héros dans l'ouest américain se fait crédible et la rencontre de la culture japonaise traditionnelle avec le monde indien laisse présager quelques belles pages. Découverte d'une culture autre, à la fois proche par bien des aspects de la culture japonaise et pourtant très différente, découverte de soi et nécessité de lutter jusqu'à trouver un sens à sa vie, regard sur la conquête du territoire américain par les colons blancs, histoire des peuples indiens et de leur quasi éradiquation... Bien des choses s'annonçaient.

Seulement voilà, il y a trop, ou trop peu. Un peu d'histoire d'amour, un peu d'histoire d'amitié, un peu d'histoire tout court, la grande comme la petite, un peu d'aventure, un peu de guerre... On en retire l'impression d'un survol et des personnages et de l'histoire. Il y a des passages qu'on aimerait voir développés, des aspects de l'histoire qui gagneraient à être un brin plus fouillés. Et puis certains dialogues m'ont semblé sonner faux. A aucun moment je ne me suis sentie embarquée dans l'épopée de ces deux hommes et du peuple qu'ils se sont choisis et je me suis même franchement ennuyée par moment malgré l'originalité de la trame. Après tout, un western sous forme de manga et mettant en scènes deux samouraïs indiens , on ne voit pas ça si souvent! Manquait juste le souffle, l'aprêté du western.

Tant pis! J'attendrai le prochain en croisant les doigts!

Taniguchi, Jiro, Sky Hawk, Sakka, Casterman, 2009, 2/5

29.11.2009

Je ne suis pas un ange

 

Midori Saejima, fait partie de la première promotion des élèves du tout nouveau lycée école Hijiri et surtout du premier comité des élèves. Avec Akira Sûdo, Mamiya et Takigawa, elle va vivre quatre années palpitantes.


Je sais qu’avec un tel résumé de l’action, je ne donnes pas envie. En même temps, il est vraiment difficile de résumer l’intrigue de Je ne suis pas un ange, à la fois extrêmement simple et franchement compliquée. Simple parce qu’il s’agit finalement des relations amoureuses et amicales qui se nouent entre les membres du comité des élèves. Complexe parce que c’est aussi un portrait de l’adolescence et de ses drames familiaux, amoureux et amicaux. Bref, Midori est amoureuse d’Akira, Mamiya de Takigawa qui a déjà une petite amie, le cinquième larron est un rugbyman bon vivant et tout ce petit monde va allégrement s’embrasser, pleurer, rire et s’amuser pendant le temps du lycée. Ai Yazawa, comme elle en est coutumière, offre à ses lecteurs une belle histoire, certes classique, mais au scénario bien écrit, aux personnages attachants et aux dessins toujours aussi agréables. Elle excelle dans la peinture de ces années où l’on passe à l’âge adulte : les doutes, les passions, les drames, les tensions familiales, tout y est croqué avec tendresse et humour. Il y a les passions amoureuses silencieuses et cachées, il y a les ruptures, la jalousie, les relations chaotiques avec le monde adulte, la peur de l’avenir, et en même temps une pêche folle et beaucoup de rire. Au fil des quatre tome, c’est tout un petit univers qui naît et qu’on quitte avec regret. Et il y a même les habituels clins d’œil à ses autres œuvres dont l’auteur parsème ses œuvres. Pour ceux qui ne connaissent pas cette mangaka, c’est une porte d’entrée sympathique, d’autant que la série est publiée en seulement quatre volumes (ok, de gros volumes, mais seulement quatre et disponibles en biblitohèque) ! Aucune raison de se priver ! Pour ceux qui connaissent Yazawa, c’est une pierre de plus à l’édifice. Et pour moi, un coup de cœur !
 

Yazawa, Ai, Je ne suis pas un ange, Delcourt, 4 vol. 5/5

25.10.2009

Kimi Wa Pet

Sumire est une jeune femme belle, intelligente, active, sexy et froide... Enfin, ça, c'est l'apparence. Journaliste de haut vol le jour, elle est aussi une jeune femme fragile et maladroite en privé. Une facette que Takeshi va découvrir. Enfin Momo puisque c'est ainsi qu'elle va nommer le jeune homme qu'elle découvre dans un carton sur le pas de saporte... C'est le début de bien des aventures...
J'étais sceptique. Plus que sceptique. Une jeune femme fait d'un jeune homme son animal de compagnie... Moui, moui, moui. Et puis de pages en pages, je me suis surprise à glousser, puis à rire franchement, voire à frémir devant les aventures hautes en couleur de Sumire et de Momo.
Que dire une fois le dernier tome achevé... C'est une série pleine de tendresse, touchante même, qui aborde avec humour les affres des relations amoureuses et professionnelles pour une jeune femme confrontée à des choix difficiles. Sumire est un personnage attachant: en la suivant dans sa vie professionnelle et privée, on découvre une jeune femme attachante qui manque de confiance en soi mais qui tente vaille que vaille de répondre aux attentes de son entourage. Finalement, la seule personne devant laquelle elle parvient à se montrer naturelle est Momo. Il lui faudra du temps pour s'apercevoir que laisser tomber les masques est le seul moyen d'atteindre le bonheur, en privé, comme en public. Petit à petit, la relation de Sumire et Momo gagne en complexité, en profondeur et permet d'aborder nombre de problèmes sentimentaux rencontrés par les jeunes femmes japonaises, mais aussi occidentales. Kimi Wa Pet parle aussi bien du regard porté par la société sur les relations amoureuses que des choix à faire entre vie professionnelle et familiale, des concessions dans les relations de couple, du déséquilibre social et culturel dans le couple. Et surtout, il montre comment on se laisse parfois aveugler par des exigences quand l'amour peut arriver par les voies les plus improbables.
Il est amusant de voir les sentiments de nos deux protagonistes évoluer, de voir les triangles amoureux se faire et se défaire au fil des pages et des situations provoquées par leur entourage familial et professionne. Car il n'est pas seulement question d'amour dans ce manga: il parle aussi du monde du travail japonais et de ses dérives, pression, rivalités, harcélement. Il parle du monde de la danse. Il parle de la volonté de se montrer parfait et de la souffrance imposée par les masques que la société impose de porter. Il parle des pressions familiales et des rivalités qui peuvent s'installer entre membres d'une même fratrie.
Ceci dit, tout cela est entrecoupé par des épisodes très drôles, parfois vaudevillesques, pardois oniriques, qui arrivent toujours à point nommé pour relancer le scénario.
                                        
Sumire est un beau personnage de femme moderne déchirée entre des aspirations contraires, entre réussite professionnelle et une vie plus traditionnelle incarnée par son amie Yuri.
 
Porté par un scénario maîtrisé, Kimi Wa Pet est un manga enthousiasmant qui offre une galerie de personnages vraiment attachants et fouillés, et qui cache sous son côté burlesque bien des choses! A déguster sans modération.
Et parce qu'apparement nous avons le même genre de discussion au Japon et en France, je ne résiste pas au plaisir de vous offrir cet extrait de dialogue qui m'a fiat hurler de rire:
"-Sumiré: Concentre-toi et imagine. Tu es prêtes?
Tu as un chien.
Yuri: oui
Sumiré:
Tu adores ce chien. Tu l'aimes tellement que tu préfères le promener au lieu de passer du temps avec ton copain.
Y: mouiii...
S: quand un beau jour, ton chien se transforme en prince charmant et là, il te demande en mariage pour...
Y: Sopt. Arrête, j'ia une imagination limitée!
S: si c'était un conte de fée, la suite serait facile à imaginer.
Y: oui, "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants"...
S: mais est-ce que les princesses ont pu aimer normalement un prince qui a été un chien ou un crapaud...
Y (à son chien Mick): Mick, tu veux bien te transformer en Viggo Mortensen?
S: Est-ce que l'on peut si facilement changer ses sentiments à l'égard d'un être? Un prince surgit. Est-ce qu'on ne va pas trop vite en supposant qu'elles tombent amoureuses?
Y (toujours à son cien Mick): tu deviens Viggo... Tu es Viggo...
S: Yuri, tu m'écoutes?
Y: si tu ne peux pas, je peux me satisfaire d'Orlando Bloom..."
Oui hein...
Ogawa Yayoi, Kimi Wa Pet, Kurokowa, 14 tomes, série terminée, 5/5
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19.10.2008

Le fleuve Shinano

 

Yukié Takano est belle, belle comme sa mère qui s'est enfuie après l'avoir mise au monde, lascive comme sa mère qui l'a conçue dans l'adultère, libre et dure comme peu de femmes le sont dans le Japon du début du 20e siècle. Ses amours vont être à l'image du Shinano, ce fleuve qui traverse sa région natale: violents, tourmentés et imprévisibles.

Adapté d'un roman de Hideo Okazaki, ce manga en trois tomes de Kazuo Kamimura et Okazaki est une petite merveille graphique et poétique.

Ce n'est pas tant le scénario lui-même qui m'a marqué, que le dessin. Sobre, clair, il prend toute son ampleur dans des planches sur pleine page d'une rare beauté. On se sent basculer dans les paysages où se déroulent les aventures de l'héroïne, on reprend sa respiration avant de replonger dans les affres sentimentaux de la jeune femme. La métaphore du fleuve représentant la vie avec ses crues, ses pièges, ses tourbillons prend vie avec les représentations du Shinano. Avec ce dessin, le récit prend toute son ampleur et s'épanouit. Des poèmes s'intègrent aux planches, des extraits de lettres aussi. Un peu comme une voix off dans un film qui fait entendre la voix de personnages superbes.

 C'est si beau qu'on en oublie presque le fond de l'histoire, le parcours amoureux de cette jeune femme hors du commun. Yukié est une sorte de fleur véneuse qui fait le malheur des hommes qu'elle croise comme eux font le sien. Ce qu'elle cherche dans leurs regards, dans leurs étreintes, elle ne le trouve jamais et fuit toujours plutôt que de perdre sa liberté. En faisant cela, elle se refuse paix et tranquillité, et sombre de plus en plus profondément dans un enfer qu'elle a elle-même créé. Elle se perd, et se condamne à être rejetée par une société sévère. C'est ce parcours amoureux qui se révèle être la faiblesse de l'oeuvre finalement: on s'imprègne au premier tome de l'histoire de cette toute jeune fille, avant de se lasser petit à petit de ses aventures et mésaventures de femme fatale puis de reprendre le fil dans un troisième tome, plus sombre et amer. Autant sa personnalité peut apparaître comme complexe, et les thèmes traités au travers de sa vie intéressants (crise économique, morale sociale, prostitution et vie maritale), autant à un moment, vient un sentiment de stagnation: à force de répétition, le scénario perd malheureusement de sa force.

Reste malgré tout ce dessin fabuleux et la paix teintée de mélancolie que l'on ressent en refermant le dernier tome.

 

Un avis sur Critique BD, la critique de Krinein par Juro.

Kazuo Kamimura et Hideo Okazaki, Le fleuve Shinano, t. 1 à 3, Asuka, 2008

02.09.2008

Manga part 2: love stories

Et pour inaugurer le joli mois de septembre, quelques histoires d'amour!

 

Le sablier, Hinako Ashihara, Kana

3 volumes parus, 7 à paraître, série terminée au Japon

 



L’hiver de ses 12 ans, An quitte Tokyo pour suivre sa mère, fraîchement divorcée dans son village natal. Entre amitiés naissantes, amours adolescentes et drames familiaux, commence pour elle le délicat chemin vers l’âge adulte.

 

Un coup de cœur, rien de moins ! Le sablier est un shôjo rare, un de ceux qui tout en délicatesse raconte une histoire banale et pourtant importante et aborde des sujets de société brûlants.

L’image du sablier est magnifiquement utilisée : à la veille de son mariage, An retrouve un petit sablier. Ce petit objet ramène à elle les souvenirs de 14 années de vie écoulées depuis cet hiver où elle est venue s’installer chez ses grands-parents. Le temps qui s’écoule et ne revient pas est un des thèmes majeurs de ce manga. An, touchée par le divorce de ses parents, par un deuil difficile, des décisions lourdes de conséquences découvre petit à petit l’amitié, l’amour, la vie tout simplement. On retrouve bien sûr le traditionnel  triangle amoureux et quelques unes des figures imposées du genre, mais sans niaiserie. Pas de petits cœurs roses qui volètent, juste des regards, des atermoiements, des retrouvailles passionnées. Les personnages sont justes, les événements amenés avec rapidité maos cohérence.

Ajoutez à cela un graphisme limpide et travaillé, et vous obtenez un shôjo des plus attachants.

 

Les avis de Fashion et Clarabel.

 

Merci à Fashion pour le prêt !

 

Itadakimasu, Yuki Yoshihara, Soleil manga

4 volumes, série terminée

 



Naeko travaille dans l’agence matrimoniale dont son ex-mari est le directeur. Un ex-mari qui n’a pas renoncé à reconquérir la femme qu’il a trompé jusqu’à plus soif. Mais c’est sans compter sur le fait que Naeko tombe amoureuse d’Ouji, de 10 ans son cadet et accessoirement… son ex-beau-frère !

 

Attention, nous ne sommes pas dans le shôjo, mais dans le josei, c’est-à-dire la comédie sentimentale pour jeune femme ! Cette précision faite, force m’est d’avouer qu’il s’agit d’une lecture des plus anodines. Itadakimasu est un agréable moment de lecture servi par un graphisme classique, un scénario sympathique agrémenté d’un brin d’humour et de quelques galipettes ! A noter tout de même qu’il aborde le sujet du divorce, encore assez mal perçu au Japon si j’ai bien compris le message de la mangaka ; Autre point fort, l’héroïne de l’histoire est plus âgée que son amoureux. Elle travaille, il est encore lycéens.  Or, s’il est communément accepté que des jeunes filles aient des relations amoureuses avec des hommes beaucoup plus âgés qu’elles (parfois contre espèces sonnantes et trébuchantes, ce qui est une forme de prostitution), l’inverses est moins facile à faire accepté, et cela au Japon comme dans les pays occidentaux. Une thématique intéressante donc, traitée de manière légère et tendre. Si je trouve les tomes suivants à la bibliothèque, je me pencherai sans déplaisir sur la suite de l’histoire !

 

New-York, New-York, Marimo Ragawa, Panini

4 volumes, série terminée

 



Ken Walker est un policier new-yorkais lambda si ce n’est qu’il cache à son entourage le fait qu’il est homosexuel. Jusqu’au jour où il croise Mel Frederics, un jeune homme calme au passé sombre dont il va tomber amoureux.

 

Un brin de yaoi pour continuer ! Autant le dire tout de suite, je n’ai pas accroché à cette série même si je lui reconnais d’indéniables qualités ! Au rang de ces qualités, New-York, New-York aborde des questions et des problèmes graves : inceste, perception de l’homosexualité dans certains milieux et dans le cadre familial, sida, adoption homoparentale, etc. sans tomber dans le moralisateur ou le démonstratif. On suit tout simplement la vie d’un jeune homme qui avait caché jusqu’alors son homosexualité et qui se trouve devant des choix difficiles, devant une famille qui ne se doutait de rien. Mais les mésaventures répétées de Mel, l’absence d’humour, la mièvrerie des scènes d’amour m’ont, je l’avoue, fatiguée. Dommage parce que pour le reste, on peut parler d’une œuvre de qualité et utile !

 

 

 

27.08.2008

Manga power, part 1: A boire et à manger

Puisque je suis décidemment indécrottable, même quand il s’agit de manga, je trouve le moyen de faire parler ma gourmandise native !

 

Aya conseillère culinaire

Akyo Aoushi, Sabouro Ishikawa, Bamboo

4 volumes parus, un à paraître, série terminée au Japon en 5 volumes
 



Aya Kisaragi est conseillère culinaire free lance. Son travail ? Redresser les restaurants en perte de vitesse, traquer les fautes et les faussaires de la cuisine avec une compétence unanimement reconnue et une dureté tout aussi célèbre. Mais les gens ne sont pas toujours aussi simples qu’ils ne paraissent…

Il y avait déjà un moment que j’entendais parler d’Aya dans mon entourage de LCA et gourmandes notoires ! Heureusement, Delphine était là pour me prêter les trois premiers tomes de la série ! J’ai donc pu à mon tour me plonger dans les délectables aventures de notre pourfendeuse de la mauvaise cuisine !

Premier bon point pour cette série, des personnages principaux plutôt attachants. Aya a un fichu caractère, semble se faire une joie de faire tourner en bourrique son entourage, montre une absence de morale parfois alarmante, mais fini toujours par révéler un humanisme touchant, une volonté d’aider son prochain en l’amenant à se dépasser et un talent de cuisinière hors du commun. Son assistant, Ippei Kawaï, novice dans l’art de la cuisine et du conseil culinaire est d’une maladresse hilarante et fait un contrepoids parfait à sa patronne. On prend un plaisir certain à suivre leurs tribulations.

Mais il n’y a pas que ça, et c’est le deuxième bon point pour la série : les histoires qui composent les différents volumes sont autant de manière d’apprendre au lecteur à connaître la cuisine japonaise, ses traditions, des spécialités, la manière dont elle a incorporé et adapté les apports de la cuisine occidentale. Et elles sont aussi l’occasion de mettre en lumière des rapports humains plus ou moins conflictuels, de poser la question de l’argent, des relations entre hommes et femmes, de la réussite et de l’échec.

Alors bien sûr ce manga est de facture classique et l’intrigue reste relativement attendue, mais la très bonne tenue de l’ensemble rappelle aussi que c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes ! Et qu’avec un peu de miso pour relever la sauce, il n’y a aucune raison de bouder un plaisir bien mérité !

 

L’avis de Fashion, Gawou!

Delphine merci pour le prêt !

 

Les Gouttes de Dieu

Kamino Shizuku, Glénat
2 volumes parus, série en cours au Japon



Un œnologue japonais renommé décède en laissant un étrange testament. Son fils qui avait choisi de suivre une autre voie que le vin devra affronter un des meilleurs œnologues pour recevoir son héritage. Le challenge : trouver 12 grands crus, et le meilleur de tous, le 13e. La traque des Gouttes de Dieu commence.

 

L’amour des français pour le vin n’est plus à démontrer, mais les japonais ne sont pas en reste et c’est ce que montre ce fort sympathique manga. A travers les aventures de Shizuku Kanzaki, c’est l’univers du vin qui est décrypté pour les néophytes. Dégustation, crus, vignobles, appellations, tout y passe pour le plus grand plaisir des yeux, de la tête, et de papilles qui frétillent à l’idée du pop caractéristique provoqué par l’intervention de cet instrument étrange appelé tire-bouchon ! La grande force de cette série est de faire, certes, œuvre de vulgarisation, mais avec un sérieux qui lui a valu la reconnaissance de la profession. Juste pour illustrer mon propos, toutes les étiquettes reproduites sont identiques à celles qui existent !

Ajoutez à cela un scénario sérieux, des personnages attachants, des histoires secondaires qui se greffent harmonieusement à la principale, et vous aurez une série à découvrir, et à suivre !

 

L’avis de Delphine

 

07.08.2008

Lady Snowblood

 

 

 


Emprisonnée à vie Osayo n’a qu’une idée : concevoir un enfant pour tuer ceux qui ont assassiné son époux et son fils avant de la violer. Lorsque Yuki vient au monde son destin est tracé : elle sera l’instrument de la vengeance de sa mère, lady Snowblood tueuse émérite.

 

Et voilà un nouveau classique du manga !! Publié pour la première fois en 1972, Lady Snowblood a le même scénariste que Lone wold and cub dont je vous ai déjà parlé ici (je suis bloquée au tome 13, et harcèle la bibliothèque pour avoir la suite). Il a inspiré Quentin Tarantino pour le film Kill Bill. Un film que j’adore ! C’est vous dire si je me suis jetée sur le premier tome quand le hasard l’a mis sur ma route ! Et pour situer le niveau, j’ai acheté le deuxième, incapable d’attendre plus longtemps pour connaître le destin de Yuki !


 




Mais foin de ces considérations oiseusement personnelles ! Passons à la forme et au fond ! Lady Snowblood est comme Lone wold and cub construit sous forme des petites histoires qui se suivent de manière plus ou moins chronologiques et qui permettent petit à petit de découvrir Yuki, ses talents et sa personnalité. On la voit accomplir un à une des contrats, utilisant l’argent et l’influence ainsi gagnés pour se rapprocher de ses proies. Même si les structures des histoires sont relativement répétitives, il y a toujours un élément, un personnage, un événement qui créent la surprise et font déraper l’intrigue. Le trait clair et précis permet d’apprécier au mieux les aventures de l’héroïne et de profiter de décors détaillés. Ceci dit, si ce manga est réservé à un public averti ce n’est pas pour rien. Cette histoire de vengeance est d’une rare violence : les scènes de combat et de massacre sont fréquentes et parfois assez difficile. D’autant qu’il n’est pas rare que le sexe y soit mêlé : que les femmes soient victimes, que Yuki l’utilise comme arme ou qu’elle ait à s’enfoncer dans l’univers de la prostitution, chaque histoire comporte son lot de scènes du genre. Bien que ce ne soit pas vulgaire, les âmes sensibles devraient à mon avis passer leur chemin ! Je m’explique : Lady Snowblood donne aussi une leçon sur le Japon de l’ère Meiji. On y aperçoit des pages d’histoire politique comme d’histoire des mœurs. Et il faut bien dire qu’au Japon comme ailleurs, le sexe était appréhendé de bien des manières ! Mais ce n’est cependant pas le seul aspect de la culture nippone qui soit abordé, et on peut apprendre ainsi par la bande bien des choses !

 

Quand au personnage lui-même, il est fascinant : au premier abord, Yuki paraît froide, voire insensible. Imperturbable quelque soit la situation, elle fait preuve d’une maîtrise d’elle-même presque psychotique. Puis, petit à petit, on voit apparaître l’enfant blessée, la jeune femme perdue sous la carapace. Un être qui fait preuve de compassion, d’un sens moral étrange certes, mais de sens moral. C’est donc un personnage bien moins monolithique que ce que l’on pourrait penser : oscillant entre folie et lucidité, soif de vengeance et volonté de vivre, talent de tueuse et fragilité.

 

Je m’arrêterai là et vous conseillant vivement ce classique en deux tomes seulement, ce qui mérite d’être noté !

 

Kazuo Koike, Kazuo Kamimura, Lady Snowblood, Kana Sensei.

Tome 1 Vengeance sanglante

Tome 2 Qui sème le vent récolte la tempête


 

07.05.2008

Au plus profond du monde des rêves

 

Il était une jeune fille qui souhaita bonne nuit à sa famille. Et qui ne se réveilla pas. Partie au plus profond d’un rêve.

Là où les rêves se créent, dans un konbini où les livreurs de rêves viennent faire leur course, en compagnie du patron et de Satoru, elle va vivre le temps des rêves.

 

J’ai eu un peu de mal à démarrer la lecture de ce seinen. Le dessin un peu fouillis, un peu rond et un peu pointu, un scénario abracadabrant m’ont un peu refroidie. Une petite fatigue aussi, admettons le. Et puis la magie a opéré. On retrouve dans ce manga l’ambiance du Voyage de Chihiro dans ce manga. L’héroïne se retrouve dans un lieu hors du temps et de l’espace. Un endroit plein de mystère et de poésie où passent ceux qui sont endormis, ou morts quand ils ont trop de regrets pour entrer sereinement dans la mort. Pourtant, elle n’est pas morte. Pas physiquement. Mais doutant de ses sentiments, de son être, elle s’est petit à petit effacée. Elle s’est adaptée à ceux qui l’entouraient au point de disparaître.

Elle va trouver au pays des rêve ce dont elle a besoin : un espace pour s’exprimer, pour aimer, pour jouer, pour se trouver enfin. Et c’est un bel endroit que cette épicerie. Tenue par un chien qui porte un bonnet, elle est emplie de marchandises mais aussi de bouteilles et de canettes où sont conservés les sentiments de ceux qui sont passés par là pour s’en libérer. Une dimension triste, presque philosophique contrebalancée par un humour omniprésent : le Bon Dieu attaque des paquets de biscuits qu’il laisse ouverts dans les rayons, les autres patrons sont autant d’animaux vêtus de tabliers et costumes… Le trait assez étrange transcrit à merveille les sentiments des personnages, la couverture superbe et colorisée dans des teintes douces rend justice au contenu.

C’est beau, c’est doux et tendre : cet univers entre deux monde devient une scène où l’humain trouve à s’exprimer dans tous ses aspects. On en sort le cœur léger et l’âme sereine, avec le sentiment d’avoir fait un beau voyage.

 
Hisae Iwaoka, Yumenosoko, Au plus profond des rêves, Kana, 2007, 186 p.

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